44. Le retour d'Eliah
Puisque j'étais à l'université, j'en ai profité pour allcampus... -Parce que z'êtes peut-être pas au courant, mais le campus, c'est comme un village, tout le monde s'occupe de tout le monde-, j'appris donc par la rumeurer voir ce qui collait pas rond chez Eliah. Pourquoi ne pouvait-elle pas rejoindre l'association comme tous les membres de la famille ? J'appris par la rumeur du , qu'elle avait quitté son association de rupins pour aller vivre avec Antoine Joubert, le fiancé de Shératan qui se laissait vivre depuis que sa chérie était rentrée à Vipercanyon. Je les surpris attablés devant des sandwiches... à la viande. Heureusement, si ça avait été du fromage, je me serais carapaté vite fait.
J'appris par la même occasion, qu'elle était au mieux avec la mascotte des lamas, un certain Jones dont j'ai oublié le prénom. Oui-ben, Elle a pas arrêté de changer d'amoureux durant ses études à rallonges, étonnez-vous que je les aie pas tous en mémoire. Enfin bref, c'était le dernier. Le dernier avant le suivant.
Eliah aussi avait troqué son aspiration au plaisir, ruineuse, contre une sage aspiration à la famille. Mais pour l'instant, elle était toujours aussi instable. Voilà-t-il pas qu'elle s'ennuyait dans la petite maison d'Antoine et qu'elle parlait de nouveau de rejoindre une association alors qu'elle était à la veille d'avoir -oserai-je dire enfin- terminé ses études.
Elle avait espéré pouvoir choisir et retrouver ses cousins pour fêter son beau diplôme, mais l'administration du campus, n'aime pas plus que moi les girouettes.
-Vous êtes déjà inscrite dans une association. Vous n'avez pas le choix, soit vous restez tranquillement dans votre maison de poupée, soit vous retournez d'où vous venez.
C'était donc ça le grand mystère. C'est pas l'envie d'y rentrer qui manquait, c'était le règlement-règlement. Bon des règles n'en faut, je suis pas contre, à condition qu'elles aient une justification. Et là ? Pouvez-vous me dire ce que ça pouvait leur faire aux administrateurs qu'elle crèche ici ou bien ailleurs ? Pour le temps qu'il lui restait à tirer...
Ennnfin ! Une fois son diplôme en poche, elle organisa une grande fête de fin d'études à laquelle elle convia Farhid, Kaphir, son copain Jones et... notre petite Ophelia. Soit disant pour lui faire découvrir l'ambiance du campus et qu'elle se trouve pas dépaysée le jour où elle devra y aller. J'aime autant vous dire que j'ai fait des bonds hauts comme ça en la voyant lui apprendre à se servir de la machine à bulles. On a ce truc là à la maison depuis qu'Eliah avait fait du chantage à Alpherg pour l'avoir, mais personne ne s'en sert jamais. On se la garde quand même, parce que, je sais pas si vous avez remarqué le nombre de trucs inutiles qu'ils réclament, les descendants, mais suffit que vous fassiez du vide, et du coup, ils se rendent compte que c'est le seul truc qui manque à leur bonheur. C'est comme la table de mixage, la basse, les statues et j'en passe.
Après la fête, l'a fallu ramasser le bazar, les flûtes de champagne qui trainaient, les toilettes qui débordaient, -le champagne ça fait pas bon ménage avec la machine à bulles, je vous signale à toutes fins utiles- le diplôme à encadrer, et là voilà partie direction Vipercanyon. Je me suis faufilé dans le taxi. Mine de rien, ça m'avait fatigué ces vacances. Surtout à cause du souci que je m'étais fait au sujet de Zeneb. Mais tout était rentré dans l'ordre et moi aussi, j'aspirais à rentrer.
Quand elle arriva à la maison, l'accueil fut plutôt glacial. Faut vous dire que le comité d'accueil, c'était Khali. Et comme de bien entendu, elle posa la question piège
- Tu aimes le fromage fondu ?
La réponse tomba comme un couperet
- Je peux pas l'encaisser, ça pue !
C'était clair et net. Même si elle avait tiré un trait sur son passé, Eliah en avait gardé un certain sens du raffinement. Et son sens du raffinement, ben il cadrait pas avec le fromage fondu. En plus, pour prouver à Khali que le fromage fondu c'était tout sauf de la bonne cuisine, elle appela à la rescousse, un copain à elle. Un maître d'hôtel qu'elle avait eu maintes fois l'occasion de rencontrer quand elle faisait la tournée des grands ducs.
Khali essaya vainement de convaincre le-dit maître d'hôtel qu'il y connaissait rien en cuisine.
-Vous n'allez pas me dire que le fromage fondu ça ne vaut pas toutes les cochonneries que vous servez au restaurant. C'est crémeux, ça coule tout seul, ça fond dans la gorge et surtout, ça se sent de loin. Vous devriez essayer, je vous garantis que ça vous ramènerait des clients.
Il ne voulut rien entendre le manche à balai. Pourquoi je dis ça ? Z'avez jamais remarqué que les maîtres d'hôtel, c'est coincés de chez coincé. Parce que ça travaille dans des endroits où pour le prix du plat du jour tu nourris une famille de six, ça se croit issu de la cuisine à Jupiter.
- Ah non, je vous arrête tout de suite. Le fromage ça se sert sur un plateau où l'on reconnait tout de suite les fins gourmets qui peuvent vous dire je prendrai un morceau de reblochon et une petite lamelle de cantal, à moins que... il est comment votre morbray ? Les autres, ceux qui n'y connaissent rien, comme vous, ils se contentent de désigner les fromages du doigt, hérésie ! et de dire je prendrai de celui-là, parce qu'ils sont bien incapables de mettre un nom sur celui-là, précisément.
J'aime autant vous dire qu'il s'est pas fait une amie de Khali, avec ses grands airs.
- Entièrement d'accord avec toi, chéri, approuva Eliah.
Chéri ??? Quoi ?! Non, ne me dites pas... Attendez, attendez que je m'approche... Oh-non ! pas ce débris, pas cette tête de fourmi dans la famille. Mais il est d'u-ne laideur ! Verriez pas qu'avec son aspiration à la famille Eliah nous en ponde 10 comme lui. J'espère que c'est une plaisanterie. Bien sûr, un maître d'hôtel, ça manquait dans la lignée, mais vous avouerez... pas celui-là, par pitié, pas celui-là !
Comme si ça ne suffisait pas pour se faire mal voir de celle qui se considérait comme la maîtresse de maison, Eliah a regarni le frigo.
- M-mais, y a que du fromage là-dedans ! De mon temps, il y avait toujours au moins une dinde, quelques petits homards, des hamburgers pour les gamins. Ah-mais ça ne va pas du tout ! C'est la pénurie dans le désert ou quoi ?
Un coup de fil à l'épicerie et elle fut tout de suite rassurée. Son seul problème, ce fut d'arriver à caser tout ça entre la réserve de fromages de Khali.
- Elle m'énnerrrrve ! fulmina Khali lorsqu'elle découvrit l'ampleur des dégats. Elle avait eu la frayeur de sa vie en ne trouvant plus ses chers fromages qu'elle avait été obligée de repêcher dans le bac à légumes, enveloppés dans du papier d'alu et calfeutrés dans des boîtes alimentaires.
- De qui tu parles ? interrogea Ophelia en prenant place à table
- De la tante Eliah, de qui d'autre ? Depuis qu'elle est revenue, elle se croit tout permis, tu n'as pas remarqué ? Elle ne fait rien comme tout le monde. Elle baissa d'un ton en voyant Eliah se préparer un petit chili et aller s'installer à la table de la salle à manger.
- Tiens regarde-là qui fait bande à part. On la croyait morte depuis le temps, et maintenant, faut qu'elle se distingue.
- Pourquoi on la croyait morte, la tante Eliah, Ophelia ?
- Meuh-non, on ne la croyait pas morte. -Fais attention à ce que tu dis Khali, voyons !- Elle était partie depuis très longtemps à l'université, alors, on avait presque oublié qu'elle aussi était de la famille. Tu comprends ?
- Comment elle est de la famille ? C'est une soeur à maman aussi ?
- Nan, c'est un peu plus compliqué. C'est la fille d'un cousin de grand-père. Mais tu peux l'appeler tante Eliah, c'est plus simple.
Ben moi, j'étais pas mécontent. Avec l'arrivée d'Eliah, que j'avais toujours trouvé belle fille, il y allait y avoir un peu de fantaisie dans cette maison. Parce qu'entre Tanguy qui remplissait ses barres, Khali qui se remplissait de fromage et les filles qui ne pensaient qu'à leurs études, c'était un peu mortel, -si j'ose dire. J'étais d'une humeur charmante. Je me promenais tranquillou dans le jardin, humant l'air du soir, les trous de nez au vent, quand soudain...
Non, c'est pas vrai, dites-moi que je rêve ! Eliah avait invité le manche à balai pour un rendez-vous. Et le pire, c'est qu'elle avait l'air complètement entichée de l'horreur.
Non-mais regardez-moi cette horreur : le nez écrasé qui lui plonge dans la bouche, des petits yeux vicieux, une bouche de macaque. Elle va quand même pas me faire ça !
Une descendance avec cette tête là, moi je dis niet, nein, no, JAMAIS !!!
- Calme-toi Maxou, ce n'est pas si grave
- NAN, JE ME CALMERAI PAS ! Non-mais, tu te rends pas compte Jeanne ! Tu l'as pas bien regardé. Si tu voulais sortir de ta tombe, tu verrais que c'est pas possible. Une hor-reur ! Je te dis que c'est une horreur ! Comment peut-elle s'être entichée d'une horreur pareille ?
- Il est peut-être très gentil
- Oui bien sûr, il est très gentil... manquerait plus qu'il morde ! Tu vois, ce qui m'agace chez toi, c'est que tu serais prête à accepter n'importe quoi
- Et ton challenge, Maxou, tu y penses ? Il serait le bienvenu pour ton fichu challenge, non ?
- NAN ! Même pour le challenge j'en voudrais pas. N'importe qui, mais pas celui-là.
17 A5 baiser
- Je crois pourtant qu'il va bien falloir que tu t'y fasses. Et puis, qui sait ? Regarde Cécile
- Quoi ? Cécile est revenue ?
- Non, je disais, regarde Cécile, avec Hélios, tu craignais le pire et pourtant, Alioth était beau garçon
- Coup de chance ! Et puis là, attends, elle en veut 10 ! Nan-nan-nan, c'est pas possible, c'est pas possible, je te dis ! Ooooh-nooonnn ! Ils s'embrassent. Je veux pas voir ça !
J'aime autant vous dire que mon moral en avait pris un coup. Pour me consoler, je me suis intéressé de plus près à Tanguy. Il en était où dans sa recherche des connaissances ? Bien-bien-bien-bien, il avait arpenté toute la maison en long, en large et en traviole armé du pistolet à empreintes de Zaniath et il était capable de vous dire qui avait couché dans ce lit-là, qui s'était assis sur cette chaise-là et qui avait déposé son offrande dans ce pot-là. Faut dire que pour le pot, y avait pas besoin du pistolet. La dernière à s'en être servie, ça pouvait être que Fawsia. M'enfin, lui, si le pistolet ne disait rien, il savait pas. C'était bien la peine d'être devenu un crak en logique.
Après le nettoyage, il s'est remis à la créativité. Cette fois, il a abandonné le piano et la batterie pour la guitare. Faut voir comme il vous la chatouille, la guitare. Lui, son truc, c'est le jazz. En plus, comme il est bien le seul à ne pas avoir peur de voir un fantôme, il peut en jouer jusqu'au bout de la nuit. Parce que les autres, ils se rentrent dès 7 heures du soir en priant le ciel que nous z'autres on reste dans le jardin. En ce moment, leurs prières sont exaucées, mais ça durera pas, je préfère prévenir.
Enfin, pour en revenir à Tanguy, maintenant qu'il maîtrise la créativité sur le bout des doigts, j'espère qu'ils vont lui montrer le chemin des chevalets qui ne servent plus depuis que Benjamin nous a fait la joie... -que dis-je la joie ?- l'immense déplaisir de venir nous rejoindre au cimetière. Bon, tant qu'il reste dans son trou, il nous gêne pas beaucoup, faut bien le dire. Mais, qu'il y reste, surtout !
Lui manquait plus que la cuisine, et c'est maintenant chose faite. Efficacité, c'est le mot qui me vient à l'esprit. Ben voilà; Tanguy c'est l'efficacité même. Il a pas traîné toute une vie avant de remplir ses barres, lui ! Pas comme d'aucun si vous suivez ma pensée. Lui reste plus qu'à se faire plaisir en devenant chef de staff, ce qui ne saurait tarder.
A part Khali qui ne peut pas la souffrir, tout le monde s'est fait à la présence d'Eliah. Faut dire qu'Eliah, c'est une bonne fille. Un peu gaffeuse, mais brave quand même. Elle n'a pas manqué de féliciter Tanguy pour avoir apporté sa contribution au challenge. Ce qui, soit-dit entre nous n'a pas eu l'air de plaire à Khali qui craint qu'elle n'ait jeté son dévolu sur lui. Si seulement c'était vrai.
- Tu vas t'ennuyer à présent, comment vas-tu occuper ton temps libre ? lui a-t-elle demandé. Depuis qu'elle était arrivée elle l'avait toujours vu étudier, et maintenant qu'il n'avait plus rien à apprendre, quelle serait son utilité ?
- Ne t'en fais pas pour ça, je suis sûr qu'il me reste encore bien des mystères à découvrir. L'univers est grand et il doit bien y avoir de la vie sur d'autres planètes. Il paraît que certains ont rencontré des extra-terrestres, moi ça ne m'est jamais arrivé. Je demande à vérifier.
Vérifie, mon gars, vérifie ! Seulement, je les connais les enflures, c'est jamais quand on les appelle qu'ils débarquent, hélas.
Ophelia devra bientôt aller rejoindre ses cousins à l'université. Elle aussi a bien travaillé : En plus de toutes les bourses liées aux compétences, elle a obtenu le prix Tzang de danse et la bourse des orphelins. Lui reste plus qu'à décrocher la blanche du billard et le dédommagement aux victimes d'enlèvement par les extra-terrestres. Celui-là, j'y crois pas trop pour les raisons sus-nommées. Mais la bourse du billard ne saurait tarder d'après ce que je crois. C'est vraiment une virtuose, faut voir les coups spéciaux qu'elle nous fait, aussi bien avec le xylophone qu'avec la tasse. Mais Ophelia, son grand truc, ça reste quand même le mariage. Elle y pense de plus en plus, mariage et fiançailles reviennent en boucle dans sa conversation. Sauf que... le jardinier n'a plus la cote.
Hé-oui, c'est comme ça les ados, un jour tout feu tout flamme pour un homme inaccessible, le lendemain, ça rencontre un jeune de leur âge qui occupe toute la place dans leurs pensées. Et le jeune en question, c'est le petit livreur de journaux. Il lui a confié qu'il avait pris ce petit boulot pour pouvoir aller à l'université parce que presque toutes ses demandes de bourses avaient été rejetées. De fil en aiguille, ils sont devenus très amis et très amoureux aussi. Ophelia a voulu goûter aux joies des fiançailles avant l'heure et elle lui a proposé de devenir sa petite amie officielle. Je sais pas si ça résistera à l'usure du temps, les amours, mais pour le moment, m'ont l'air bien accrochés tous les deux. Et physiquement, le petit, l'est pas trop moche pour une fois. Ca change du manche à balai d'Eliah.
Naaan, j'aurais pas dû reparler de ça, voilà que j'ai le moral à zéro, encore une fois.
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